Voie ferrée & ripplemarks se côtoient dans cette ancienne carrière souterraine de pierre à bâtir. Les carriers ont exploités plusieurs bancs de roches: en grande partie du calcaire. Celui-ci a été extrait à la lance et taillé au pic comme en témoignent les nombreuses incisions visibles sur les piliers tournés. Puis, en ciel, les ouvriers se sont attaqués à une autre couche, plus marneuse. Celle-ci laisse apparaître des ripplemarks, fonds des mers fossilisés. Le lagon peu profond ayant permis au cours du temps la formation de la roche calcaire a peu à peu laissé sa trace dans le sable, imprimée pour toujours dans cette couche de marnes. Une voie ferrée parcourt encore ces chantiers fortement étendus.
Esseulé sous les ripplemarks, ce pilier consolide un carrefour. C’en est d’ailleurs l’unique consolidation. Appelé piliers à bras, ce genre de pilier, plutôt répandu dans les carrières anciennes, est construit en empilant des blocs irréguliers les uns sur les autres. Ceci permet d’obtenir une cale, moyen temporaire de maintenir le ciel. Au fond à gauche, la galerie fut entièrement remblayé. Le remblayage des vides est un moyen archaïque mais très efficace pour consolider les galeries! Ce moyen est toujours en vigueur de nos jours, à contrario de la galerie de droite en état très délabré. Cette carrière de gypse, en seconde masse, fut intensivement utilisée au XIXe siècle et jusqu’au début du XXe pour la fabrication du plâtre.
Ce pilier tourné penché met en évidence le pendage géologique de cette ancienne carrière souterraine de gypse. À l’origine exploités pour la pierre à plâtre, les vides de cette carrière servirent ensuite pour la culture des champignons, le climat constant de ces souterrains frais et humides étant propice à cette utilisation. Les champignons étaient cultivés en plate-bandes, des ornières étaient alors laissées pour permettre le passage des champignonnistes mais aussi des véhicules. Ces derniers empruntaient des galeries de roulage parfois, comme ici, signalisées avec des panneaux routiers. Au ciel de la carrière, on aperçoit des fameux ripplemarks, souvent remarquables dans les couches de gypse.
Comme dans un mille-feuille dans cette ancienne carrière.
C’est un mille-feuille de pierres qui est exhibé par cette galerie. Les strates de gypse ressortent, tout comme les nombreuses plaques qui se sont décollées du ciel, et tombées sur les hagues. Ces hagues sont des accumulations de stériles faites dans les galeries: non rentables, ces stériles ont été laissés sur place du fait de l’accès complexe à ces souterrains autrefois attenants à une plâtrière. Cette galerie servait de roulage, la voie ferrée de 40cm d’écartement et le petit wagonnet en sont les témoins. Au ciel, le mille-feuille présente des ripplemarks, traces de rivières et de lagons préhistoriques peu profonds dans lesquels s’est progressivement formé le gypse saccharoïde, pierre à plâtre.
Le fond des mers se retrouve au fond des terres au fil du temps.
Le fond des mers, avec le temps, finit par se retrouver au fond des terres. Quand la mer se calme et devient lagon, les sédiments se déposent, durcissent, et impriment durablement les formes que les mouvements de l’eau leur ont donné. Bien plus tard, lorsque l’Homme vient extraire le gypse, pierre qui par cuisson lui fourni le plâtre, il remet à jour ces formes dissimulées depuis des millénaires. Par effet négatif, les strates sus-jacentes ont elles aussi imprimé les formes des fonds des mers, les ripplemarks. Ici, bien que l’exploitation eût lieu dans des couches de seconde masse, d’imposantes galeries furent creusées.
Une petite file de wagons fossilisés par le temps dans une carrière souterraine. Ces wagons miraculeusement conservés sont des wagonnets plateaux, servant à transporter des objets, des outils, ou des blocs. Leur chassis, en métal et en bois, est extrêmement corrodé et pourri. En effet, le lieu est humide comme en témoignent les boues abondantes au sol mais aussi la ligne de mise en charge de la galerie, présente à la base des piédroits. Cette galerie fut taillée de façon rectiligne à la lance par des techniques de souchevage et défermage. On trouve le sens de creusement de la galerie par les lignes verticales au mur: celles-ci délimitent précisément le défermage, et matérialisent l’avancement de la galerie. Lorsque les carriers attaquaient une nouvelle avancée, il était nécessaire de décaler la lance vers l’intérieur de la galerie pour pouvoir manier l’outil. Plusieurs outils utilisés durant l’exploitation sont d’ailleurs remisés le long des parois. Au ciel, il est intéressant de voir des ripplemarks, les traces fossilisées du fond des mers préhistoriques. Sur un des trois wagonnets est posé un cuffat, il s’agit d’un gros tonneau pouvant transporter des blocs ou du personnel dans le puits d’accès. Posé simplement sur le véhicule, le système permettait aisément de de jongler entre déplacement vertical et horizontal.
Quatre bras soutiennent le ciel. Cette ancienne carrière de gypse exploite la seconde masse de roche. Ses galeries sont plutôt basses, et son caractère ancien, rudimentaire, la classe parmi les plâtrières où les consolidations par piliers à bras étaient utilisées. Plus rares dans le gypse que dans le calcaire, les piliers à bras sont censés être provisoires dans les carrières de gypse, soutenant des espaces en attente de remblaiement ou de masse en attente d’exploitation ou de purge. Comme on le sait, après abandon, le provisoire devient définitif. Ainsi, ces grands piliers (plus de 2 mètres) maintiennent à travers les siècles le ciel se fracturant tranquillement… Mais nous ne passons pas sans remarquer, sur ce même ciel, les ripplemarks, traces fossilisées du fond des mers lagunaires dans lesquelles le gypse s’est lentement formé.
Dans une carrière de gypse, des piliers à bras de gypse
Ces piliers à bras de gypse restent rares dans cette carrière. En effet, le gypse est une roche très friable. Exploiter une carrière en piliers à bras (car montés à la force des bras) avec du gypse est donc peu recommandé. On voit d’ailleurs que ces piliers et notamment celui du fond résistent très mal aux forces de compression imposées par le ciel massif. Force est par ailleurs de constater les magnifiques traces de sédiments préhistoriques qui ornent ce ciel, on appelle ces traces Ripplemarks.
Cette galerie s’appelle, comme le mentionne l’inscription au ciel, la « galerie du Bourdon ». Il s’agit en fait d’une galerie de liaison entre deux anciennes exploitations de gypse voisines. L’inscription indique d’ailleurs la distance de la limite d’exploitation ainsi que sa direction. La particularité de l’exploitation est d’avoir été faite en galeries basses. En effet, on est en première masse de gypse, mais une grande épaisseur de bancs a été laissée au ciel. Cela permet d’augmenter la stabilité tout en évitant l’installation de boisage. Cependant, en pied de carrière, les marnes sous-jacentes sont ici exploitées: on voit bien cette couche inférieure qui se délite plus rapidement que les autres, et qui favorise l’affaissement de l’ensemble de la galerie… La voie permettant le roulage des wagonnets est artisanale, l’écartement des rails est de 65cm. Ces rails consistaient en de simples barres métalliques fixées avec des clous appelés « spikes » à des traverses en bois encastrées dans la terre. Au ciel, mises en lumières par un éclairage rasant, on aperçoit les traces appelées Ripplemarks, anciens fonds des océans ou des rivières préhistoriques. Cet ensemble rend la galerie d’un intérêt particulier.