Tous les éléments ou presque, sont réunis pour une photo ferroviaire parfaite. Un cours d’eau dans la montagne, une forêt, un ouvrage d’art ancien, un monument en ruine. Il ne manquait plus que le passage de l’autorail. Cet EAD, élément automoteur diesel, passé de mode depuis bien des années, est affrété par une association. Il relie alors Valence à la région gapoise. On l’aperçoit durant quelques secondes alors qu’il commence seulement à attaquer sa longue ascension le long de la rivière Drôme.
Il enjambe la vallée, défie les montagnes, déchire l’horizon. Cette réalisation peu connue d’une figure de l’architecture métallique permettait aux trains de franchir une profonde vallée où coule un torrent. Son impressionnant tablier, aussi haut qu’un immeuble de six étages, voyait en effet passer des voyageurs venant de Paris ou de Lyon. Aujourd’hui, son fer rouille. Ses piles sont attaquées par l’érosion. On remarque son dernier souvenir, une remise en peinture avant l’arrêt des circulations sur la ligne qu’il supporte.
Le Pont Naufragé, car émergeant de l’eau comme s’il s’agissait d’une épave ayant touché le fond, disparaît peu à peu sous les eaux. En fait, c’est évidemment le niveau d’eau qui remonte. Après une vidange rendue nécessaire en prévision de la fonte estivale des neiges en montagne, le lac de Serre-Ponçon fut asséché de manière exceptionnelle. Ainsi, le viaduc de Thubaneau, situé entre les communes de Chorges et Prunières, fut de nouveau visible durant quelques jours. Cet ouvrage d’art était situé sur la ligne ferroviaire de Veynes-Dévoluy à Briançon, laquelle fut déviée sur un tronçon d’une vingtaine de kilomètres dans les années 1950 en prévision de la construction du barrage.
Embrun est au soleil avec ce train traversant le Briançonnais.
Au soleil provençal, réapparaissant avec le printemps, cet autorail descend vers Gap. Traversant le torrent du Bramafan sur le viaduc éponyme, il s’apprête à desservir Embrun, un bourg situé au cœur des Alpes, niché sur ses barres rocheuses. Filant au milieu de vastes paysages, le massif du Queyras en toile de fond, cette ligne ferroviaire reliant Briançon à Gap, Valence ou Grenoble suit le cours de la Durance, une longue rivière connue pour ses crues dévastatrices. Emblématique du département des Hautes-Alpes, la ligne se prête autant à l’acheminement des vacanciers qu’au transport quotidien des locaux ou simplement à la contemplation de l’environnement montagnard. C’est incontestablement un moyen de désenclavement de la région.